Il y a toutes sortes de façons de voyager et certaines fois, il n’est pas nécessaire d’aller très loin pour découvrir d’autres horizons.
En effet, l’aventure humaine est souvent présente au détour d’un chemin et nombre d’entre eux mènent désormais vers un des 1200 éco-lieux qui existent en France et dont le nombre ne cesse de grandir.
Qu’est ce qu’un éco lieu ?
Ces éco-hameaux, fermes collectives, tiers-lieux, constituent des lieux de vie où l’on vient expérimenter des modes d’existence, sobres et solidaires, au service du vivant. Ils sont tournés vers l’écologie et revendiquent tous des valeurs communes : le partage, la solidarité, la résilience et la convivialité.
La carte secrète de leur emplacement est dévoilée comme un trésor, sur le site du réseau national des oasis. On peut se rendre facilement dans ces habitats participatifs le temps d’un week-end, d’une semaine ou plus longtemps selon le temps dont on dispose.
Chaque année, ce sont des milliers de personnes qui font la démarche vers cet « ailleurs », en France ou à l’étranger (car il en existe aussi dans de nombreux pays). Ils sont poussés par la curiosité de la découverte et l’attrait d’une certaine nouveauté, la quête de sens qu’il trouve difficilement dans la société dans laquelle ils évoluent, ou une source d’inspiration vers l’objectif d’un changement de vie programmé.
Parmi les pépites des écolieux, perché au-dessus du village de Le Vigan dans le parc national des Cévennes : Etika Mondo. Cet endroit s’est inscrit comme une référence du genre, depuis sa création en 2018. Boris Aubligine, son fondateur, le qualifie de : « laboratoire grandeur nature en écologie humaine vers un monde plus éthique ». Selon lui, la recherche d’un confort matériel à tout prix nous a coûté cher au regard des rapports alarmants du GIEC (climat) et de l’IPBES (biodiversité). D’après l’ONU, nous avons dépassé les limites, le point de non retour comme le chante si bien Alain Souchon dans sa chanson « on avance, on avance, tu vois pas tout ce qu’on dépense, c’est une évidence, on a plus assez d’essence pour faire la route dans l’autre sens ».
Le « Overshootday » (jour du dépassement de la terre) semble lui donner raison. Cet indice évalue chaque année le jour à partir duquel l’humanité est censée avoir consommé l’ensemble des ressources naturelles qu’elle est capable de produire, et ce jour ne cesse d’avancer. On vit désormais à crédit les derniers mois de l’année en consommant les réserves qui nous restent.
Chacun à son niveau tente d’apporter des solutions à ces situations inquiétantes en agissant avec bon sens et volonté de faire bouger les choses, sans rester les bras croisés.
« Dans le monde tourmenté et peuplé d’angoisses dans lequel nous évoluons, nombre d’entre nous se sentent seuls et impuissants. Etika Mondo tente d’apporter des réponses en offrant un cadre d’accueil structuré dans un environnement apaisant qui laisse libre cours au questionnement, à l’échange et aux solutions par l’action » témoigne Viktor, un des permanents.
Etika Mondo et la mise en valeur des écolieux
Etika Mondo, situé en pleine nature, dans un domaine de huit hectares offre donc un véritable pôle expérimental, (en partenariat avec l’école des mines d’Alès et le parc national des Cévennes) qui réhabilite des modes ancestraux (culture, construction etc) en les modernisant avec les connaissances scientifiques que nous avons désormais à notre disposition. Ces sciences modernes que nos aïeux ne possédaient pas et que nous tentons de mettre au service d’une évolution raisonnée.
La famille Etika Mondo (Boris et Emilie Aubligine avec leurs 4 enfants) qui ont été, au cours des années, rejoints par des bénévoles permanents de tout horizon, se sont donnés comme mission de transmettre leurs compétences dans chaque domaine, en enseignant, en démontrant qu’il existe des solutions de construction de son habitat, de gestion de son alimentation, de gestion et de réduction des déchets, tout en mêlant le vivre ensemble et l’intelligence collective.
Chez Etika Mondo, on s’implique aussi aux côtés d’ingénieurs et de scientifiques, dans la recherche en agroécologie, en foresterie synchronique, en maraîchage sur sol vivant, en low-tech, en génie écologique, en photo épuration pour augmenter la biomasse, en restauration de la biodiversité.
On mise sur la recherche de nouvelles pratiques quotidiennes efficaces en phase avec les écosystèmes en apprenant les fondamentaux, en théorie et en pratique. Le but est de pouvoir en appliquer les mécanismes qui pourront peut être inverser positivement nos modes de fonctionnement et ainsi tenter de concilier les besoins humains en termes de ressources et le respect de la planète qui nous accueille.
Les centaines de « stagiaires » qui se rendent chez Etika Mondo sont de tous âges, de toutes origines, de toutes conditions et viennent de partout en France, ainsi que d’autres pays francophones pour apprendre et comprendre. Ils sont là aussi pour se retrousser les manches lors d’exercices pratiques au coeur du vivant, ou de chantiers écologiques massifs, pendant lesquels, des dizaines de volontaires redonnent le sourire à des agriculteurs épuisés, en les aidant, pendant plusieurs jours dans des tâches de restauration, d’amélioration, d’optimisation de leur exploitation et de leur production. Ils apportent union, soutien, force et énergie à certains exploitants qui sont tentés de baisser les bras. Ces CEM participent au passage à préserver la résilience de notre système alimentaire en sauvant des lieux de production agricole ou fermes qui sans eux et leur intervention altruiste auraient disparu.
Charlotte, stagiaire estivale, témoigne : « Chez Etika Mondo j’ai compris le point clé entre l’humain et la biodiversité. Cela me redonne de la motivation pour croire au monde d’aujourd’hui et de demain ». Sans cesse au contact de la nature, il ne faut pourtant pas s’attendre quand on arrive, à la douche chaude et au bain moussant. On se trouve en totale immersion hors de sa zone de confort, en dormant sous des tentes, en mangeant les produits du jardin et en participant à toutes les tâches liées à la vie en communauté. Pour compenser, les veillées guitare, les ciels étoilés, les soirées dansantes et l’expression permanente d’une certaine joie de vivre communicative sont un pont entre l’utile et l’agréable.
Pour certains des 600 « Etikamondiens » cette expérience aura constitué un éclairage enrichissant, tandis que pour d’autres, elle sera le point de départ d’un changement de vie plus durable. Les états d’esprit évoluent et l’émulation prend corps. Peu à peu les consciences s’éveillent et ce lieu inspirant et bien d’autres suscitent des vocations utiles, comme autant de petites pierres que l’on vient apporter à l’édifice qui nous abrite. Cette planète unique que l’on ne peut pas encore copier avec une imprimante 3D.
Les petites rivières feront des grands fleuves. « I have a dream » répète sans cesse Boris Aubligine le créateur d’Etika Mondo et ils sont de plus en plus nombreux à rêver avec lui à travers un monde plus durable ou l’on peut aussi entreprendre des voyages intérieurs responsables.
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